Toujours extrait du livre « Regard sur l’Ostrevant » d’André Lebon
Le pain confectionné à partir de farine sommairement blutée est grisâtre et dense. Lorsque les boulangers s’installent dans les villages les plus importants, ils acceptent des conventions avec les agriculteurs : ceux ci leur remettent une portion de blé en équivalence de la fourniture annuelle du pain.
Pour les autres, le paiement a lieu à la « taillette » : lorsque la confiance est établie entre le client et le commerçant, ce dernier prépare deux planchettes ou deux baguettes en osier, une pour chaque partie. A chaque livraison le boulanger pratique au couteau une entaille par pain sur les deux taillettes et le règlement s’effectue par périodes déterminées (à la quinzaine dans la région de Denain (59)) au vu des marques qu’on efface ensuite.
Dans les ménages la confection du pain donne lieu à la confection de quelques pâtisserie avec les restes de pâte : des « tourtons », petites galettes à la cassonade, des « flamiques » aux oignons et aux pommes, des « bouloches » pommes entières enfermées dans la pâte, des « pagnons » boules de pâte enrobées de sucre.
Avant de devenir plus tard un aliment de soutien, le pain est d’abord le mets de résistance par excellence. Il est toujours croisé avec la pointe du couteau avant l’entame.
Le plus souvent, on le consomme en tartines épaisses, des « cantiaux », accompagnées de saindoux, de pâté, de « mou fromache », mais très rarement, sauf pour les plus riches, avec du beurre. On le trempe aussi, rassis, dans la soupe et le lait, et bien des gens terminent leur repas en « touquant » les dernières croûtes dans le fond de leur bière.
Le mineur lui, superpose plusieurs tartines garnies, ou bien, place à même la miche une boule de fromage blanc fortement assaisonné d’ail ou d’échalote. C’est le « briquet ».
Enfin on déguste beaucoup de « pain perdu » ou « pain crotté », tartines trempées dans le lait et l’œuf battu avant d’être poêlées, et des goyères au « cras fromache » et grillées au four.